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Cercle Littéraire Chronique d’un psychiatricide !

ECRIRE EN TERRE DE PSYCHIATRIE

Les écrits concernant la psychiatrie ou plutôt le traitement de la folie existent depuis fort longtemps, ils sont toutefois plus nombreux à dater de l’avènement de l’aliénisme au XIXe siècle. Celui qui s’intéresse à la psychiatrie trouvera des articles ou des livres sur tous les courants et toutes les périodes de son histoire. Ces textes pour la plupart relèvent de l’homme de l’Art, le psychiatre, mais d’autres s’y sont frottés, des philosophes, des sociologues, des psychologues, des journalistes et  plus rarement des infirmiers et des patients. On peut s’interroger sur la vocation de ces écrits. Si ceux qui relèvent de médecins avaient le plus souvent pour vocation de nourrir et d’alimenter cette discipline, d’autres pouvaient prendre un autre angle d’attaque, il n’est que penser à Michel Foucault et notamment à L’Histoire de la folie à l’âge classique, ou à Albert Londres, Chez les fous, ou encore à Erving Goffman, Asiles.

Je suis enclin à penser que la question de l’écriture en terre de psychiatrie se pose d’une autre façon en ce début du XXIe siècle. Il y a urgence à écrire, il y a urgence à lire, dans notre société que l’on qualifie de société de la performance. Il y a urgence, parce qu’il y a péril. La psychiatrie est en passe de se dissoudre, de perdre son âme. Nous assistons impuissants à sa dissolution dans la médecine d’une part et dans les neurosciences d’autre part. S’il ne s’agissait que du statut de cette discipline, l’affaire ne serait pas bien grave, mais cette dissolution la condamne à faire l’impasse sur ce qui devrait être son « objet », la souffrance d’une personne, pour se consacrer uniquement au traitement et à la gestion des symptômes. 

Désormais ne peut et ne doit exister que ce qui est quantifiable et évaluable. Ce phénomène n’est pas propre à la psychiatrie mais, pour cette dernière cela revient à dire que ce qui faisait sa singularité, tisser du soin, tisser du lien à partir de « petits riens », n’a plus le droit d’être. La clinique psychiatrique est une véritable question politique, elle dit quelque chose de la société dans laquelle nous existons, elle est véritablement une question citoyenne.  

La littérature psychiatrique nous questionne à plusieurs titres, elle nous permet de nous interroger sur ce que nous voulons que soit le soin psy, au-delà de la promesse des neurosciences : demain nous serons à même de traiter avec succès tous les troubles psychiatriques. Elle nous questionne également sur la fonction de l’écriture et de la lecture dans notre société et plus particulièrement pour ceux qui ont fonction de soigner. L’écriture et la lecture pourraient soutenir l’exercice du soignant, relancer son désir et le relier à d’autres qui partagent ou au contraire s’opposent à sa vision du soin.

Je pense que la littérature psy pourrait en quelque sorte être un « sport de combat », pour tous ceux qui refusent la fin d’une psychiatrie à visage humain, pour tous ceux qui s’opposent à la réification des malades et des soignants. Une littérature qui nous redonne notre dimension de sujet.

Patrick Touzet auteur du livre Chronique d’un psychiatricide

1 Comments

  • Hemeret
    Posted 4 janvier 2025 at 8 h 29 min
    4.9/5

    Écrire c est communiquer, une empreinte dans la préhistoire de notre métier. Maltraité, chahuté, dénigre pour aimer l humain dans sa folie. Si on ne dénonce pas comme l à fait Patrick, on cautionne une société en pleine dérive. Bravo à l homme, chapeau bas au soignant…

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